Jonas

Jonas ne se souvient pas du temps qu'il a fait 1702. Ceci est écrit dans nos livres d’histoire et, aussi bien, dans ceux qu’on lit à Puiseaux, même si la langue n’est pas la même — dans mon baraquement, les hommes sont plus sages : ils sont aussi plus souvent dans la montagne, à l’exercice ou à l’embuscade, et nos colonels sont prompts à punir les nuits mauvaises. Bavarde assez souvent avec Imaan. Nos misérables forces contre les nations, Kafran, les bergers des montagnes tombant sous les balles autrichiennes ou turques, des pendus dans tous les villages, les femmes et les enfants sur les routes. Les champs de bataille et les armées du roi, ses chapelles, ses campements et le bout de prairie penché où il reçut, dans la nuit, les brûlures de la foi. Comprend et aime la phrase " il faut s'habituer à perdre des choses ". Veut éternellement avoir raison même quand il a tort ; bavarde assez souvent avec Dajan. Des ombres dansent sous les aunes. La première fois où Jonas est venu à Quierzy on lui a jeté des pierres, des pinsons morts, des faucons, qui ont le bec large comme des engoulevents mais qui sont des rapaces. — s'il est vrai que les Dieux se trouvent au delà de la Septième Porte, pourquoi ne l’as-tu jamais franchie pour les détruire ; l'ossuaire est bien obscur, Jonas leva sa bougie vers un crâne plus gros que les autres... Cherche à retrouver Vania qu'il a aimé dans sa jeunesse. Cherche à retrouver Imaan ; — Envoyez-moi les plus forts, les plus fourbes, et je les hacherai. A beaucoup d'humour... Les magazines parlent plus souvent de Lila qu'Imaan, et racontent comment elle mourut à Aboncourt-Gesincourt, de la peste — il y a la terre ouverte, les arbres renversés, les petits arbres qui poussent sur le royaume autour des maisons de Neuvy sur Barangon — à peine a-t-elle fait un pas dans le couloir que le château tremble sur ses bases, que les flambeaux s’éteignent et l’instant d’après tout est redevenu normal.